Le zinc est contenu essentiellement dans les produits d’origine animale. Il est en faible quantité dans les produits végétaux.
Le Zinc est un micronutriment essentiel jouant un rôle dans un nombre important de processus biologiques. C’est un micronutriment dont la déficience est fréquente à travers le monde.
Cet oligoélément est souvent déficitaire chez les malades atteints de cancer. Sa carence est également associée à une survie plus faible.
C’est un élément fondamental pour le bon fonctionnement du système immunitaire dont le rôle est crucial au cours de l’émergence d’un écosystème cellulaire appelé cancer.
Il est donc capital de l’évaluer, dans toutes les maladies chroniques et en particulier en cancérologie.
C’est un essentiel du bilan biologique au cours du suivi d’une personne atteinte de cancer.
L’EVALUATION BIOLOGIQUE DU STATUT EN ZINC
Le Dosage sérique peut être influencé par les prises alimentaires. En effet, son taux augmente quelques heures après une prise de zinc
Le Dosage urinaire : est influencé par les apports alimentaires. Environ 20% du zinc est éliminé par les urines. La voie préférentielle d’élimination étant les fèces.
Les Dosages cellulaires : l’évaluation du zinc érythrocytaire est plus fiable, car le zinc se stocke majoritairement dans les globules rouges.
Plus rarement, le zinc peut être mesuré dans les globules blancs et le sperme.
QUEL EST LE STATUT EN ZINC CHEZ LES PERSONNES ATTEINTES DE CANCER ?
La carence en zinc est fréquente dans la population générale. Les estimations indiquent plusieurs milliards de personnes dans le monde porteuses de ce déficit qui est fréquent dans les pays pauvres. Elle induit des troubles cutanéomuqueux avec troubles du goût, alopécie, susceptibilité aux infections, retard de croissance, troubles cognitifs…
Son absorption est influencée par les conditions digestives qui sont très souvent perturbées au cours des chimiothérapies (chimiomucite). Certaines médications peuvent également aggraver cette carence, par exemple, les diurétiques, prescriptions fréquemment retrouvées dans une population où les problèmes cardiovasculaires sont fréquents. Les phytates présents dans les produits végétaux ralentissent également son absorption.
Des études ont montré que les taux de zinc sont plus faibles chez les patients atteints de cancer que dans la population générale.
Elles montrent aussi que les tissus cancéreux contiennent moins de zinc que les tissus sains[i].
On sait par exemple que le métabolisme du zinc est perturbé dans le cancer de la prostate, organe qui, lorsqu’il fonctionne normalement concentre plus de zinc que n’importe quel autre organe du corps[ii].
Une étude réalisée chez les personnes atteintes de cancer ORL montre que leur survie est d’autant plus courte que leur taux de zinc est faible[iii].
LA PRESCRIPTION DE ZINC EST-ELLE POSSIBLE AU COURS DES TRAITEMENTS PAR CHIMIOTERAPIE?

Un certain nombre de praticiens a une méfiance vis-à-vis de la prise de zinc au cours des chimiothérapies, même lorsque celle-ci est encadrée et réclament fréquemment son arrêt.
Des études ont cependant montré que certaines chimiothérapies, notamment le schéma Nab-paclitaxel Gemcitabine[iv] utilisé pour le traitement du cancer du pancréas peuvent induire une carence en zinc avec toutes les conséquences de cette déficience.
Sur le plan biologique, les expérimentations démontrent que le zinc peut restaurer l’activité de la protéine P53, protéine qui permet la suppression des tumeurs. Une étude chez la souris permet de constater que des tumeurs rendues résistantes à l’Adriamycine, chimiothérapie couramment utilisée, régressent après l’adjonction de zinc par activation de la protéine P53[v].
Chez l’homme atteint d’hépatocarcinome, il a été démontré une synergie entre les thérapies ciblées administrées (Sorafenib, Levantinib) et la prise de zinc qui réduit l’inflammation liée à la tumeur[vi].
Certains professionnels estiment que le zinc est une molécule qui bloque l’oxydation provoquée à but thérapeutique par les chimiothérapies. L’étude suivante ne valide pas cette hypothèse : elle est réalisée chez des patients atteints de cancer colorectal recevant soit du zinc et chimiothérapie, soit un placebo associé une chimiothérapie complémentaire après chirurgie colique. Elle ne retrouve pas de différence entre le groupe de patients recevant du placebo et le celui recevant du zinc en ce qui concerne les marqueurs de stress oxydatif[vii].
L’utilisation du zinc au cours des chimiothérapies ne génère pas d’effet secondaire spécifique. Dans cette étude au cours de laquelle, le zinc est associé à une chimiothérapie de type taxane-sels de platine pour le traitement d’un cancer gynécologique, non seulement, il n’y a pas de complication notée, mais on observe une amélioration des troubles du goût chez les personnes recevant du zinc[viii].
Et une autre étude démontre que la supplémentation en zinc réduit la fatigue et améliore la qualité de vie[ix].
LE ROLE PHYSIOLOGIQUE DU ZINC
Le zinc est le cofacteur de nombreuses enzymes et participe à de nombreuses fonctions organiques vitales telle que la croissance, reproduction, neurotransmission, le fonctionnement immunitaire, le transport intestinal du fer[x]…
Quelques-unes de ses actions pertinentes en cancérologie sont évoquées dans cet article.
Zinc et système immunitaire
Le système immunitaire joue un rôle capital au cours des cancers.
Il existe au point de départ de cette maladie, un processus d’inflammation chronique qui est suivi d’un épuisement du système immunitaire dans le microenvironnement tumoral.
Le système immunitaire est très sensible aux changements de la concentration en zinc dans l’organisme.
In vivo, un taux faible de zinc compromet le fonctionnement des globules blancs : polynucléaires neutrophiles, les cellules NK (Natural Killers) jouant un rôle dans la défense anticancer, les macrophages diminuant leur capacité de phagocytose. Sa carence entraine une diminution du taux de lymphocytes T et B dans la moelle osseuse et augmente la susceptibilité aux infections qui sont indésirables notamment en cours de chimiothérapie au cours desquelles le système immunitaire est par ailleurs déjà affaibli. Il a par ailleurs été démontré que l’administration de zinc augmente le taux de lymphocytes T et NK.
La déficience en Zinc, augmente aussi la production des cytokines pro inflammatoires, favorisant l’installation d’une inflammation persistante qui est le lit de maladies chroniques dont le cancer[xi].
Zinc et stress oxydatif
La protection contre le stress oxydatif, contre l’excès de radicaux libres est importante pour le maintien de l’homéostasie cellulaire.
C’est la fonction du système anti oxydant intracellulaire qui comporte à la fois des molécules et un ensemble d’enzymes : La Superoxyde dismutase (Zn/Cu SOD) retrouvée à l’intérieur des cellules a pour cofacteur le zinc. Ce dernier permet de stabiliser cette enzyme dont la diminution entretien le stress oxydatif et la progression tumorale[xii].
L’effet suppresseur de tumeur du zinc
Le zinc a une action antitumorale dans le cancer de la prostate et dans d’autres types de tumeur y compris dans les hémopathies malignes. Cela a été démontré pour certaines types tumoraux in vitro et in vivo[xiii]. Le même constat a également été fait au cours du le myélome multiple. En combinaison les traitements approuvés, il permet de réduire l’inflammation chronique observée au cours des cancers[xiv] .
Le zinc améliore la mucite post chimiothérapie ou post radiothérapie

La mucite est un problème important au cours des chimiothérapies, perturbant l’équilibre nutritionnel des malades, en plus de générer un inconfort digestif. C’est aussi une complication très fréquente au cours des radiothérapies de la sphère ORL et digestive qui peut parfois compromettre la poursuite du traitement, en plus de compromettre l’équilibre nutritionnel.
Le zinc prévient les mucites y compris chez les patients recevant des chimiothérapies intensives comme cela a été démontré dans une étude randomisée en double aveugle contre placébo[xv].
Le zinc améliore le stress psychologique.

Les malades atteints de cancers expérimentent souvent de baisse de l’humeur, anxiété, syndrome dépressif qui réduisent leur capacité à se prendre en charge.
Il est nécessaire que l’homéostasie des cellules neuronales soit maintenue afin que l’humeur soit stable. Il est nécessaire pour cela que les neurones reçoivent suffisamment de substrats énergétiques, que les neurones puissent à partir de ces substrats produire l’ATP, l’énergie universelle.
Au cours de cette importante production énergétique (le système nerveux contribue pour moins de 5p100 de la masse corporelle et consomme entre 20 et 30p100 de l’énergie produite), les mitochondries produisent des radicaux libres qu’il est nécessaire de neutraliser afin que leur excès n’altère pas les cellules. Le zinc est important car il participe à cet équilibre. Il contribue également en ce sens au maintien de la barrière hématoencéphalique pouvant être altérée par certaines chimiothérapies et responsable ensuite de Brain fog, tête dans le brouillard, brouillard dans la tête[xvi].
L’homéostasie du zinc est essentielle pour la neurogénèse, la cognition, la mémoire.
QUE FAIRE SUR LE PLAN PRATIQUE ?
Une évaluation du statut nutritionnel devrait être proposé à toutes les personnes atteintes de maladies chroniques. En cancérologie, compte tenu de l’intérêt que représente le zinc dans cette pathologie, il nécessaire que la supplémentation soit proposée après une évaluation clinique et biologique. Cette évaluation doit associer un dosage du cuivre car la prise de zinc interfère avec son absorption. Le zinc interagit également avec l’absorption du fer[xvii].
Une réévaluation dans le temps est également nécessaire avec la surveillance des effets secondaires d’une prise de zinc. Ces derniers sont rares aux doses physiologiques. Il peut quelque fois survenir un inconfort digestif qui peut être amélioré en changeant la formulation du zinc proposée. En cas de prise excessive de zinc on peut observer une diminution du cuivre et ses conséquences cliniques. Une étude a montré que le prise de 60mg de zinc pendant dix semaines décroît le taux de cuivre avec apparition de symptômes relatifs[xviii].
Des contrôles biologiques réguliers permettent une évaluation de son statut et une utilisation sécurisée[xix].
[i] Hashemi S et al. Cancer Management 2017 ; 10 (12) ; e11463
Isell BF et al. Cancer 1981 ; 47 (7) : 1845
Chistudoss P et al. Biomedical Res 2010; 21 : 445
[ii] Article cancer de la prostate en surveillance active, par Dr Djikeussi. Onconutrition.blog
[iii] Doerr TD et al. J Am Coll, Nutr 1997 ; 16(5) : 418.
[iv] Masahiro Iseki et al. Pancreas . 2024 Aug 6. doi: 10.1097/MPA.0000000000002396
[v] Ofer MargalitInt J Cancer. 2012 Aug 15 ; 131(4): E562
[vi] Dan YangHepatology . 2024 Aug 1;80(2):312
[vii] Miranda de Figueiredo Ribeiro S et al. Biol Trace Elem Res. 2016 Jan;169(1):8.
[viii] Yanazume S et al. J Obstet Gynaecol Res . 2021 Nov ;47(11):3998
[ix] Miranda de Figueiredo Ribeiro S et al. Einstein (Sao Paulo). 2017 Jan-Mar ;15(1):24
[x] Terrin G, et al. Nutrients. 2015;7(12):10427-10446.
[xi] Skrajnowska D et al. Nutrients. 2019 Oct; 11(10): 2273.
[xii] Fernandes G et al. Proc. Natl. Acad. Sci. USA. 1979;76:457–461.
[xiii] Gelbard A. IMA 2022 ; 4 : 258
Cancer de la prostate en surveillance active, par Dr Djikeussi. Onconutrition.blog
[xiv] Jahankani K et al. Food Chem Toxicol 2023 ; 179 : 113983.
[xv] Gupta SD et al. Pediatr Blood Cancer 2023 ; 70 (7) : e 30309
[xvi] Hartbottler L et al. J Ment Health 2008 ; 17 : 576
[xvii] Sandstrom Bet al. Br J Nutr. 2001;85 Suppl 2:S181-185.
[xviii] Food and Nutrition Board, Institute of Medicine. Washington, D.C.: National Academy Press; 2001:442-501.
[xix] Hoppe C et al. Clin Exp Med 2021 ;21(2) : 997